Grand excès de vitesse : la réforme qui transforme un risque routier en risque CNAPS majeur

Une réforme récente du droit routier est passée relativement inaperçue du grand public, alors même qu’elle emporte des conséquences professionnelles importantes pour les agents de sécurité privée et leurs dirigeants. Désormais, un excès de vitesse supérieur ou égal à 50 km/h au-dessus de la limite autorisée n’est plus traité comme une simple contravention : il est appelé à devenir un délit dès la première infraction.

Cette évolution concerne directement les procédures de refus de carte professionnelle CNAPS, de renouvellement de carte professionnelle CNAPS et de refus d’agrément CNAPS, dès lors que le CNAPS fonde ses décisions sur une enquête administrative incluant l’examen du TAJ.

La clé de lecture de cette réforme n’est pas seulement pénale. Elle est avant tout administrative, et plus précisément liée au TAJ (Traitement des Antécédents Judiciaires).

Avant la réforme : une inscription au TAJ rare et souvent marginale

Jusqu’à présent, un excès de vitesse supérieur ou égal à 50 km/h constituait une contravention de 5ᵉ classe. En pratique, cette qualification avait une conséquence déterminante :

Le grand excès de vitesse faisait l’objet d’une inscription au TAJ rare, non systématique et souvent absente, ce qui limitait fortement son impact lors d’une enquête administrative CNAPS.

Dans la majorité des dossiers :

  • l’infraction était traitée de manière automatisée,
  • sans ouverture d’enquête pénale structurée,
  • sans inscription systématique dans les fichiers de police accessibles aux administrations.

Pour les professionnels de la sécurité privée, cela signifiait que, sauf récidive ou contexte aggravant, un grand excès de vitesse n’apparaissait généralement pas lors d’une enquête CNAPS.

La réforme : du changement de qualification au changement de fichier

La réforme modifie profondément cette situation. En faisant du grand excès de vitesse un délit dès la première infraction, le législateur change la nature même du traitement administratif du fait.

Un délit implique une procédure pénale formalisée ou une amende forfaitaire délictuelle.

Or, toute procédure délictuelle entraîne en pratique une inscription au TAJ. Cette inscription intervient très en amont, parfois dès les premiers actes de procédure, indépendamment :

  • de la condamnation,
  • de l’issue du dossier,
  • ou même d’un classement ultérieur sans suite.

C’est ici que se situe le véritable basculement.

Inscription automatique au TAJ : un effet mécanique de la pénalisation

Contrairement à une contravention, un délit ne reste pas cantonné au champ routier. Il alimente les fichiers de police utilisés pour les enquêtes administratives, et notamment le TAJ.

La pénalisation du grand excès de vitesse a donc une conséquence directe :

ce type de fait sera désormais, dans la grande majorité des cas, inscrit au TAJ dès la première infraction.

Cette inscription est :

  • invisible pour l’intéressé,
  • rarement notifiée,
  • et souvent découverte tardivement, au moment d’un refus CNAPS.

L’inscription au TAJ, désormais automatique pour un grand excès de vitesse qualifié de délit, constitue un élément central des refus de carte professionnelle, autorisation préalable ou agréments dirigeants pris par le CNAPS et fondés sur la moralité et le comportement du demandeur.

Pourquoi le CNAPS est directement concerné

Le CNAPS dispose d’un accès au TAJ par l’intermédiaire d’agents habilités. Lors de l’instruction d’une demande ou d’un renouvellement de carte professionnelle, il ne se limite pas au bulletin n°2 du casier judiciaire.

Il examine :

  • les antécédents judiciaires,
  • les procédures en cours,
  • et plus largement le comportement global de l’intéressé.

Cette appréciation s’inscrit dans le cadre de l’examen de la moralité exigée par le CNAPS, notion largement interprétée et régulièrement à l’origine de décisions de refus ou de retrait.

Un grand excès de vitesse devenu délit peut alors être interprété comme :

  • une prise de risque excessive,
  • un manquement grave aux règles de sécurité,
  • un défaut de maîtrise incompatible avec l’exercice d’une activité de sécurité privée.

Cela vaut aussi bien pour :

  • les agents,
  • que pour les dirigeants, gérants ou associés de sociétés de sécurité.

Une difficulté supplémentaire : l’absence de condamnation ne protège pas

Un point essentiel mérite d’être souligné.

Le CNAPS peut fonder une décision défavorable :

  • alors même qu’aucune condamnation n’est inscrite au B2,
  • sur la seule base d’éléments figurant au TAJ.

Avec la réforme, un professionnel peut donc se retrouver dans la situation suivante :

  • pas de condamnation définitive,
  • parfois même une procédure pénale encore en cours,
  • mais une mention visible au TAJ,
  • utilisée pour refuser ou retirer une carte professionnelle.

C’est une source majeure d’incompréhension pour les intéressés, qui découvrent les conséquences administratives longtemps après l’infraction routière.

TAJ et CNAPS : un contentieux appelé à se multiplier

La pénalisation du grand excès de vitesse va mécaniquement entraîner :

  • une augmentation des inscriptions au TAJ,
  • une multiplication des refus ou retraits de cartes professionnelles fondés sur des faits routiers,
  • et, en conséquence, un contentieux CNAPS plus fréquent sur ce terrain.

Les enjeux se concentreront notamment sur :

  • la pertinence et l’actualité des mentions au TAJ,
  • leur caractère proportionné,
  • la possibilité d’un effacement ou d’un blocage d’accès avec mention,
  • et la prise en compte de la situation professionnelle concrète de l’intéressé.

Anticiper l’impact administratif, pas seulement pénal

Dans ce nouveau contexte, se limiter à une défense pénale classique est insuffisant. Même une issue favorable devant le tribunal ne garantit pas l’absence de conséquences CNAPS.

Il est désormais indispensable d’anticiper :

  • l’inscription au TAJ,
  • son utilisation par le CNAPS,
  • et la stratégie administrative à mettre en œuvre parallèlement à la procédure pénale.

Une infraction routière qui, hier encore, pouvait sembler sans incidence professionnelle devient aujourd’hui un facteur de risque sérieux pour l’accès et le maintien de la carte professionnelle.

Conclusion

La transformation du grand excès de vitesse en délit dès la première infraction ne change pas seulement l’échelle des sanctions. Elle modifie profondément le traitement administratif de ce type de fait, en rendant l’inscription au TAJ systématique.

Pour les professionnels de la sécurité privée, cette évolution constitue un enjeu majeur. Ce n’est plus le permis de conduire seul qui est en jeu, mais bien l’avenir professionnel face au CNAPS.

La maîtrise des mécanismes du TAJ, de son effacement ou de son blocage, devient plus que jamais un élément central de la défense.

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